Un arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, en date du 25 janvier 2024, permet de revenir sur les modalités de prise en compte de l’évolution favorable des facteurs de commercialité dans le déplafonnement du loyer.
Au cas présent, le 6 février 2015, les bailleurs, propriétaires de locaux commerciaux donnés à bail renouvelé aux locataires depuis le 1er octobre 2006 jusqu’au 30 septembre 2015, ont signifié un congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer déplafonné. Ils ont ensuite assigné les locataires en fixation du loyer du bail renouvelé.
La Cour d’appel de Nîmes a ordonné le déplafonnement du loyer et fixé celui-ci à 8.400 euros HT par an.
Griefs
Les preneurs reprochent à l’arrêt d’appel d’avoir ordonné ce déplafonnement du loyer sur le fondement de trois griefs :
- L’absence de recherche du caractère notable de l’évolution des facteurs de commercialité, condition nécessaire au déplafonnement (article L.145-34 du code de commerce) ;
- L’absence de recherche de l’incidence favorable exacte de cette évolution sur leur activité de boulangerie ;
- La prise en compte d’une période d’évolution excédant celle du bail expiré (1988-2017 et 2006-2017, au lieu de la seule période du 1er octobre 2006 au 30 septembre 2015)
Analyse juridique et décision
La Cour de cassation rappelle que selon les articles L.145-34 et R.145-6 du code de commerce, pour justifier un déplafonnement du loyer du bail renouvelé, trois conditions cumulatives doivent être réunies :
- Une évolution des facteurs locaux de commercialité
- Présentant un caractère notable
- Ayant une incidence favorable sur l’activité exercée dans les locaux loués
De surcroît, cette évolution doit être appréciée uniquement sur la période du bail à renouveler jusqu’à la date d’effet du nouveau bail.
La Cour régulatrice casse ainsi la décision de la Cour d’appel, car elle considère comme insuffisants les motifs retenus pour caractériser sur la période du bail à renouveler, une modification des facteurs locaux de commercialité présentant un caractère notable et ayant une incidence favorable sur l’activité de boulangerie exercée par les preneurs.
Portée juridique
Cet arrêt réaffirme les critères stricts d’appréciation du déplafonnement des loyers commerciaux en insistant sur :
- La nécessité d’une analyse temporelle précise limitée à la période contractuelle pertinente ;
- L’exigence de caractérisation du critère de « modification notable » ;
- L’impératif de démontrer l’impact concret et favorable sur l’activité spécifique exercée par le preneur.
Il s’agit là d’une solution classique, rappelée encore récemment par la Cour d’appel de Paris, dans une décision du 3 octobre 2024.