La mise en œuvre de la clause résolutoire d’un bail commercial, permet au bailleur d’obtenir la constatation de son acquisition par le juge, un mois après la délivrance d’un commandement de respecter les termes du bail sous réserve que le manquement reproché figure bien dans la clause résolutoire.

La Cour de cassation rappelle, dans sa décision du 25 avril 2024, que le bailleur doit en outre invoquer le bénéfice de la clause résolutoire de bonne foi, conformément à l’article 1104 du Code civil.

Faits et procédure

Le 10 juillet 2009, la SCI Des Esserts (bailleresse) a consenti un bail commercial à Mme [U], aux droits de laquelle est venue la société Calend’Auto (locataire), portant sur un terrain destiné au négoce de véhicules neufs et d’occasion. Le 26 juin 2017, constatant que la locataire exerçait sur le terrain des activités de nettoyage et de réparation de véhicules, la bailleresse lui a délivré un commandement visant la clause résolutoire, l’enjoignant de respecter la destination contractuelle des lieux. Le 26 juillet 2017, la société Calend’Auto a assigné la bailleresse en annulation du commandement.

La Cour d’appel de Chambéry a constaté la résiliation de plein droit du bail commercial, a déclaré la société Calend’Auto occupante sans droit ni titre, l’a condamnée à libérer le terrain et à régler une indemnité d’occupation.

Griefs

La société Calend’Auto reprochait à l’arrêt d’appel d’avoir constaté la résiliation du bail sans rechercher si la clause résolutoire n’avait pas été mise en œuvre de mauvaise foi par la bailleresse.

Dans ses écritures d’appel, la locataire soutenait que :

  • La bailleresse avait attendu la dernière année du bail commercial pour invoquer la clause résolutoire, dans le but d’éviter le paiement d’une indemnité d’éviction ;
  • Le fils du gérant de la SCI bailleresse, également associé de celle-ci, était le gérant de la société de nettoyage voisine, impliquant que la bailleresse avait nécessairement connaissance depuis plusieurs années des activités exercées par la locataire ;
  • Ces activités avaient été tolérées pendant toute la durée du bail avant d’être subitement contestées à l’approche du terme.

Solution de la Cour de cassation

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel au motif que celle-ci s’est déterminée sans rechercher, comme il lui était demandé, si la clause résolutoire avait été mise en œuvre de bonne foi par la bailleresse.

Portée juridique

Cette décision rappelle l’importance fondamentale du principe de bonne foi dans l’exécution des contrats, notamment ici dans la mise en œuvre d’une clause résolutoire dans un bail commercial.

La Cour réaffirme qu’un bailleur ne peut se prévaloir d’une clause résolutoire de mauvaise foi, notamment lorsqu’il a longtemps toléré un manquement avant de l’invoquer stratégiquement pour éviter le paiement d’une indemnité d’éviction.

Enfin, les juges du fond doivent impérativement examiner l’éventuelle mauvaise foi du bailleur lorsque ce moyen est soulevé par le preneur, sous peine de voir leur décision censurée pour défaut de base légale. Il s’agit là d’une position constante de la Haute juridiction (voir par exemple précédemment : arrêts du 1er février 2018 ou du 25 octobre 2018).

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